Je me suis
toujours foutue de la gueule de monsieur Patate parce qu’il a peur des
insectes.
Déjà parce
que toutes les raisons sont bonnes pour me foutre de lui. C’est vrai.
Ne le
plaignez pas trop et surtout ne pensez pas que je suis la seule à passer mon temps à
ricaner sur le dos de l’autre.
Tenez, à chaque fois que j’ai une nouvelle
fringue, il me dit que j’ai l’air d’une lesbienne qui s’ignore et à force,
croyez-moi, ça fait se poser des questions. Il m'appelle plus souvent " Gérard" que "ma puce".
Et quand on
nous demande comment on s’entend depuis qu’on vit ensemble, il se met derrière
moi et il chuchote « sauvez-moi » en imitant un type qui se pend.
COMME SI JE VOYAIS PAS.
Du coup,
hein, j’me venge.
Il est vrai
que je pourrais quand même fermer ma grande bouche parce que si tu mets un
Furby ou n’importe quel automate dans la pièce, je te fais immédiatement une
descente d’organes.
J’ai une
sainte horreur des jouets qui bougent tout seuls, résultat d’une enfance passée
au-dessus de la ligne 7 du métro et de ses vibrations qui faisaient bouger les
jouets dans ma chambre.
Ou alors
c’était pas le métro, c’était des êtres maléfiques qui réveillaient mes
saloperies de poupées parlantes ? J’avais peut-être déjà vendu mon âme au
diable, je n’ai pas attendu ma première soirée arrosée comme je le pensais, cette
fois en Irlande où j’ai bu trop de Guiness et où j’ai rencontré ce jeune
guitariste et où...
BREF.
Monsieur
Patate a peur des insectes.
J’ai eu un
premier aperçu de ses talents de couineuse le jour où on a croisé un cafard
new-yorkais qui avait traversé Broadway dans la largeur sans se soucier de ce
qui se trouvait sur sa route. À savoir : un pied de touriste allemande
dans une tong.
La dame a
beuglé comme une saucisse au curry et on s’est dit « On est encore tombés dans une fusillade, ça fait deux dans le
séjour ». Mais en fait nan, c’était juste un cafard pas poli.
Un cafard,
il est vrai, élevé aux doughnuts et aux carbohydrates de cheeseburgers, et qui
devait faire ses séances de pectoraux tous les matins après ingestion d’un
Latte au Starbuck du coin. Un cafard « Eastcoast » qui aurait pu
porter une casquette. Une petite casquette sur sa tête de cafard de 3
centimètres.
Monsieur
Patate s’est exclamé après avoir grogné-couiné-gargouillé : « Putain t’as vu la taille du machin, il était
comme ça ». Et il a montré avec sa main la taille d’un steak de
cheval.
J’ai jeté un
regard dubitatif. Et ce ne fut que le premier d’une longue série, car au cours
des nombreuses fois où il a raconté cette anecdote, il a grossi la taille de
notre « eastside cockroach » de 5
centimètres à chaque fois.
Je me suis
dit que d’habitude c’était plutôt sur des mesures autrement plus intimes que
les hommes abusaient, alors j’allais pas me plaindre.
Au bout d’un
mois, le truc avait quand même la taille d’un doberman. C’est fou ce que les
phobiques exagèrent.
Perso, je me
suis toujours vantée de ne pas avoir de peurs particulières ; ok, j’aime
pas trop les jouets qui bougent et les bêbêtes, mais de là à aller me vider de
mes intestins à la première patte velue qui passe... Y’a un monde. Du coup,
j’aime bien dire que les phobiques sont hystériques.
Ouais ouais,
le terme que tu cherches c’est bien : « connasse incapable
d’empathie ».
Mais
rassure-toi, comme à chaque fois que j’ai le malheur d’avoir un avis que je
sais légèrement rétrograde, le sort se charge de me montrer à quel point je
suis une beauf intolérante.
La connaissance par l'expérience. La sagesse à la fin. Je vais
finir par atteindre le Nirvana à ce rythme-là.
Nous
rentrions à la maison dimanche, monsieur Patate et moi-même, les bras chargés
de courses qui n’étaient absolument pas sur la liste que j’avais de toute façon
oubliée.
Je suis
allée poser mes paquets en pestant que putain, on était quand même des gros
Jacquouille à avoir ENCORE oublié le dentifrice. Alors que, hein, les
Dinosaurus en format familial, jamais on les oublie.
Et là, sur
la plaque chauffante, je vois un… ver.
Un p’tit
truc dégueulasse qui se tortille comme s’il avait la Macarena qui tournait en
boucle dans sa tête (ce qui serait triste pour lui, quand même), 15
millimètres. Blanc. Moche. Actif. VIVANT.
Première
chose que je me dis, c’est « beurk », tout en lui javellisant la
gueule sans une once de remord ou de pitié pour sa famille et ses amis
d’enfance.
À
noter : quand tu asperges un ver de javel, il se transforme en petit truc
tout dur qui ressemble à du riz.
J’informe
monsieur Patate de la présence d’un immonde lombric dégueulasse sur notre
cuisinière sans penser que, connaissant ses problèmes avec les p’tites bêtes
qui mangent pas les grosses, j’aurais mieux fait de lui dire que je le quittais
pour sa sœur, sa réaction aurait été moins violente.
Il a sorti
la tête de notre mini frigo parisien qui explose dès que tu y mets deux sacs de
courses. Il a d’abord sursauté comme si je lui avais vomi un seau d’asticots
sur la tête, et puis il s’est repris.
Il a bien
essayé de ne pas claquer des genoux, jouer le bonhomme de la baraque. Il me dit
de sa voix qu’il veut grosse, viriloïde et rassurante « Tsss, c’est rien, ça doit venir d’un bout de
viande qu’on a laissé traîner… » en reculant tout de même doucement
vers la porte.
Tandis qu’il
se porte stratégiquement entre la cuisine et le salon (pour montrer son soutien
tout en évitant une attaque de cet animal ô combien agressif), je me mets à
chercher le responsable, mais je ne trouve point de résidu de nourriture carnée
alentour. Bizarre.
Je réfléchis
à la provenance de ce vilain lombric dans la cuisine, qui tourne plus au steak
de soja qu’à la côte de porc depuis quelques temps.
Toute
personne normalement constituée aurait pensé : « un ver, comme c’est caustique, je vais nettoyer ma cuisine et il n’y
paraîtra plus ! »
Nos
grands-parents auraient pensé : « Chouette,
un ver, des protéines, ça tombe bien j’avais plus de tickets de rationnements ».
Nous autres,
enfants de la télévision américaine, pensons ceci : « Wop, putain de sa race de ragondin en leggings, y’a un cadavre à
l’étage au-dessus et ceci est une pulpe d’arthropode nécrophage de moins de 3 centimètres,
il est donc mort depuis 24 heures, appelez les Experts ».
Enfin, moi
qui nourris une obsession libidineuse pour Warrick Brown depuis dix ans, j’me
suis dit ça, et du coup j’ai levé la tête et j’ai vu…
Des vers…
Plein de
vers.
La Macarena
pour tous les vers. Une vraie boîte de nuit des années 90.
- Monsieur Patate… Ahem… Ma gerboise ?
- Oui ? T’es gentille, c’est bizarre.
Qu’est-ce qui se passe ?
- Les vers… Ils… Ils viennent du plafond…
- Wop putain ! On pourrait pas plutôt
échanger contre des hyènes enragées ? Je vis avec toi, je connais bien le
sujet. Mais les insectes p’tain… C’est des créatures du diable, ça.
Et bon,
autant les trucs qui rampent au sol, je gère, mais l’idée d’une pluie de vers
dans MA cuisine, sur MES boîtes de Weetabix, la vie de ma race la pute en jupe
Guess, je commence à comprendre que ça puisse en chatouiller l’angoisse de
quelques-uns.
- Situation d’urgence, on garde notre calme
et on ne se transforme pas en DEUX GROSSES PUCELLES (surtout toi). Qu’est-ce
qu’on fait dans ce cas ? La première chose qu’on fait quand y’a un blessé, un
mort, un génocide ? Concentre-toi bien monsieur Patate…
- … ?
- …
- J’appelle ma mère ?
- ÉVIDEMMENT qu’on appelle ta mère.
Belle-maman
a donc sauvé la situation en nous expliquant que le plus probable, c’est pas le
meurtre de sang-froid à l’étage au-dessus, mais plutôt des mites alimentaires
qui auraient partouzé dans un bol de cacahuètes et qu’il serait bon de
retrouver le paquet surprise et de faire un génocide de la marmaille miteuse.
J ai trouvé
ça vachement moins drôle et décevant. Jamais je ne rencontrerai Warrick.
J’ai donc
vidé les placards en flippant de tomber sur un paquet de chips grouillant de
saloperies de larves.
Du bout de
mes gants de vaisselle, je tenais les boîtes et poussais des gargouillements de
bête apeurée en les jetant dans une grande poubelle que monsieur Patate tenait
à bout de bras en insultant le principe même de diversité naturelle, Darwin,
Dieu.
Il a fini
par prétexter une urgence aspirateur pour s’exiler à l’autre bout de l’appart’.
Pendant ce
temps- là, les larves au-dessus de ma tête étaient passées à du Ricky Martin
(« un dos tres, Maria »,
fais pas genre tu connais pas. D’ailleurs maintenant tu l’as dans la tête), et
la vie de sa race le tapir autiste, j’étais pas loin de l’hystérie
susmentionnée.
Tout ça pour
dire qu’on a jamais trouvé la source mitesque et :
- que je
frissonne à l’idée de rentrer dans la cuisine depuis.
- Que je
suis pas prête de remanger du riz.
Et que la
prochaine fois que je me moquerai d’un phobique, jetez-moi un ver de terre à la
face.
Degueu ....ça m'est arrivé la meme chose...dans ma poubelle ....il y a 2mois....je soulève le couvercle ,et la ,HORREUR ,ça grouillait des memes immondices que chez toi !!!! Moi aussi j'ai crié ,gargouillé ,couiné ,puis j'ai javélisé tout cela ,plus de nouvelles depuis ....
RépondreSupprimerAh ,au fait ,c'est Anne-onyme ,qui te parle en direct de sa cuisine !!!
SupprimerAh ben moi pareil dans la poubelle de l'immeuble, j'ai fait un bond, heureusement que je n'avais pas mon fils dans les bras ! Individuellement les vers ne me font pas peur, mais là c'est juste dégueu, quoi...
SupprimerCa t'es arrivé a TOI? impossible, tu as une bouteille de désinfectant greffée dans la main droit et une éponge dans la gauche!!!!
RépondreSupprimer(mais tu restes sexy hein...)
Non non ,en ce moment c'est un fouet de cuisine dans la main droite et une clope dans la main gauche ...;autant dire "welcome vers et cafards"
SupprimerFinalement tu n'as plus très envie de manger chez moi hin ....gnihihihi
En même temps, dans la poubelle, ça peut être une mouche qui a pondu, dans un fromage périmé surmonté d'un steak et avec des épluchures et des fruits pourris. Même en désinfectant tout, les trucs qu'on met dans la poubelle nourrissent bien ce genre de bestioles...
SupprimerLaisse-toi pousser du poil, on verra ses réactions.
RépondreSupprimerEt pour les vers...vérifie quand même le voisin du dessus.
Sven L.
Je préférerais que ce soit le voisin d'a côté... celui qui traîne sa nana de connasse.
SupprimerMême si elle le mérite, je trouve que ca manque de fair-play.
bouaerk ! dégueu ! (pas peur mais berk)
RépondreSupprimerle pire ça doit etre de ne pas trouver le paquet de chips fossilisées qui héberge la nichée de mites...
t'as des aérations dans ta cuisine qui donnent chez les voisins ? j'en ai bouché 2 dans la salle de bain, depuis, plus un seul cafard ! étonnant isn't it ? c'était des colonnes d'aération communes à tout l'immeuble, bien au milieu (pas vers l'extérieur, quoi), avec une vague grille devant, meme pas de moustiquaire à l'intérieur. j'ai collé au béton une planche de 2 cm d'épaisseur à la place de la grille. depuis, nickel !
donc, étape 2 dans ta cuisine : vérifier les aérations :)
de rien de rien,
et vivi ça peut finir en grand ménage d'automne, un ptit coup de parano anti-bebettes
mais quand meme... des vers qui descendent du plafond... (image subliminale d'une attaque de zombie ! arf ! j'arrete de parler de ca, c'est contagieux la phobie, argh...)
On a effectivement des suspicions de vide ordure dégueulasse, on lui a aspergé sa mère de produit anti-mites. On a du désinfecté la moitié du bâtiment.
SupprimerPeut-être faudrait-il finalement domestiquer une petite famille de cafards parce que ça bouffe n'importe quoi, les cafards, y compris des vers je suis sûr. Sinon, t'as pensé aux araignées ?
RépondreSupprimerje vois bien monsieur patate avec son eélevage de cafards " et ca c'est le petit dernier, jean-michel <3"
SupprimerChuis sûre qu'il finirait par avoir une approche toute maternelle de la chose.
il lui mettrait une minuscule goutte de vernis à ongles orange sur la tete, et il le surnommerait "103" ? (joke littéraire kislapète :-p)
SupprimerTu aurais pu en profiter pour raconter cette histoire en vers ! :D
RépondreSupprimerMDR! Une steak de cheval... en fait moi j'ai le meme probleme avec les araignes...
RépondreSupprimer