lundi 28 novembre 2011

Un peu de culture dans ta tête avec Mlle O.

Quand tu vis à Paris, tu te vantes toujours d’être là où tout se passe : concerts, expositions, pièces de théâtre, les avant-avant-avant-premières en tous genres… C’est bien connu, tout se passe à Paris.

Le reste c’est bon pour la foire à la choucroute annuelle de ces villes de province où on se pâme encore sur les stars de la téléréalité et le vin chaud.
Ces mêmes villes où on tourne les « Confessions Intimes » et qui ne possèdent ni arrondissement ni ligne de métro.
Ces zones de non droit où les rues sont vides le dimanche et dès 20h les soirs de semaine… Ces villes où il n’y a pas de restaurant indien ou coréen…
Mais je digresse.
Oui, à Paris on est des connards… Et on a peur des ploucs qui vivent par-delà le périphérique, c’est pour ça qu’on préfère que tout se passe chez nous.

Ce qu’on oublie de te dire c’est que même si tout se passe à Paris, ça se passe souvent sans nous. Déjà parce que y’a tellement de choses que tu apprends souvent trois semaines après que ton groupe fétiche passait.
Mais que, si ça peut te consoler, il jouait pour la modique somme de deux fois le prix de l’album (que de toute façon tu as certainement téléchargé sur les sites de la piraterie webienne).

On omet de te préciser aussi qu’on n’est pas les seuls à le savoir que tout se passe à Paris, alors y’a toujours un monde fou partout.
Les expositions par exemple, tu passes plus de temps à te maudire dans la queue de plusieurs kilomètres de ne pas avoir chopé des coupe-file (en province tu sais pas ce que c’est les coupe-file… parce que des files d’attente y’en a pas) qu’à arpenter les salles des musées.
Il faut toujours prévoir un thermos de café, des moufles/des lunettes de soleil, deux bouquins et une sérieuse réserve de patience pour ne pas réduire en Slim Fast les vieilles peau anorexiques et peroxydées avides de belles œuvres qui pullulent dans la capitale et qui, pour l’amour de l’art, n’hésitent pas à te passer devant.
À l’expo Klimt, Moser et Kokoshka, j’ai attendu trois heures sans jamais accéder à la salle, ni d’ailleurs avancer d’un mètre.
De guerre lasse j’ai mangé du Mac Do et regardé des « How I met your Mother ». Si la culture ne veut pas de moi, j’irai chez ses concurrents directs. Rienàfout’.

Une fois rentré dans les lieux de réjouissance et délesté de minimum 10 euros, ne te réjouis pas. Tu ne verras pas autre chose que des cuirs chevelus graisseux qui se pressent devant les tableaux.
J’ai un souvenir dégoûté de l’exposition de Hans Bellmer et ce n’est pas à cause des ses phallus géants et de ses poupées tarabiscotées à jambes multiples, mais plutôt à force de contempler le manque d’hygiène capillaire de mes contemporains.

La culture accessible ? Mon cul. La prochaine fois je fais semblant d’être handicapée. (J’oserais pas… Je suis fille d’assistants sociaux… Quoique justement ça faciliterait mes recherches de fauteuils roulants et je pourrais peut-être négocier une ristourne. Hin hin hin).

Une fois n’est pas coutume, dimanche après-midi, avec mon Chauve de compagnie et le Photographe, mon ami de toujours, on a décidé d’aller voir l’expo HEY! MODERN ART & POP CULTURE à la Halle Saint-Pierre.
Hey !, c’est un magazine pour graphiste-à-mèches qui coûte la modique somme de 17.90€ mais dont tu ne peux pas regretter un seul centime.


En bon photographe/directeur artistique/imposteuse en agence, on se devait d’être à la pointe de la hype de la culture alternative…
Mon chauve l’est, le Photographe se défend carrément, quant à moi qui ne vole jamais mon statut de tricheuse professionnelle, je ne connaissais même pas la revue et c’est uniquement les noms de tatoueurs qui ont fait briller mes yeux.
Et pas des moindres :
Guy LE TATOOER et Jean-Luc NAVETTE qui sont dans mon top 10 des meilleurs artistes français et à qui je confierais volontiers ma couenne.
Et bien sûr Karl MARC qui, à défaut d’être le futur père de mes enfants (Maîtresse Gamelle m’a dit que ça se proposait pas comme ça, alors bon), est celui que j’ai choisi pour me gratouiller la peau du dos avec ses petites aiguilles coquines et accessoirement salement douloureuses sur tout ce qui est côtes et nonos en tous genres. Il a officié sur ma personne la semaine dernière mais je vous raconterai ça quand le souvenir sera moins… cuisant.

 Guy LE TATOOER

et Jean-Luc NAVETTE, des tatoueurs « un peu » doués.



Le reste, connaissais pas. Ou peu.
Et benh mon cochon, j’ai pas été déçue du voyage. En feuilletant la liste des artistes je suis tombée sur le doux sobriquet de Karotte (& Chris) BONOBO, déjà ça pouvait pas être une expo de merde.
Il me semble qu’avec un blase pareil tu n’as pas d’autre choix que de finir pute sur un navire long courrier ou artiste décalé. Oui je sais c’est certainement pas son vrai nom mais laisse-moi rêver un peu. Si tu connaissais mon nom de famille tu saurais que j’ai besoin de savoir qu’il y a pire ailleurs.



L’expo s’organisait en deux thèmes :
SALLE DU HAUT : tendance « j’ai-envie-d’utiliser-tous-mes-crayons-de-couleur-et-je-vais-le-faire-devant-tes-yeux-éblouis-ébahis». La salle pop culture psychédélique avec beaucoup de zizis dedans.

SALLE DU BAS : tendance « je-m’ouvre-les-veines,-d’accord. Mais-graphiquement ». La salle trashy et gothisante avec beaucoup de zizis dedans (aussi).
Pour moi elle est de loin la plus intéressante et je ne suis pas la seule à l’avoir pensé. À faire en dernier donc.

Et pour ceux qui résistent à ma petite chronique culturelle d’amatrice sans aucune véritable connaissance du sujet : une petite liste de mes coups de cœur.
Promis, j’évite les critiques artistiques foireuses parce qu’à tous les coups je vais tomber complètement à côté.

YU JINYOUNG et ses poupées tristes et translucides. M’est avis qu’on ne doit pas être bien tous les jours dans ses baskets en Corée. Ses petites filles qu’on s’attend à voir sangloter d’une minute à l’autre n’ont pas de corps et pas d’entrailles et ça ne les empêche pas de remuer les tiennes.
Le Photographe a essayé d’en piquer une mais le gentil monsieur de l’entrée a dit que c’était pas trop trop possible. Il était TRÈS déçu.




Silvia B. : encore des poupées étranges tout droit sorties d’un conte nordique (elle est hollandaise, je suis pas SI LOIN que ça) avec ses mutants aux visages tricotés ou aux gambettes de satyres. Chouli et onirique.




Jessica HARRISON : quand tu vois ses gracieuses petites figurines en porcelaine tu penses immédiatement à une tasse de thé à la bergamote chez une lady anglaise qui sent un peu le formol et le pipi de caniche. Ton sourire attendri disparaîtra quand tu découvriras quelques détails sanglants. Attention à ne pas cracher tes biscuits.





Alexandre NICOLAS donne une origine aux super héros, mais pas à grand renfort de film « Genesis » à grand spectacle pour décérébré de la boîte à idées. Plus terre à terre, il les imagine en Super-Fœtus. Il me réconcilierait presque avec les super héros dont je me fous comme de mon premier placenta.





Mischa GOOD : si tu as une âme d’enfant et une libido de vieux pervers, les psychotoys du docteur Good sont faits pour toi. Dans la liste au Père Noël de ce sombre individu : du chibre en plastique et des Barbie estropiées, et pour ceux qui aiment les petites voitures un sublime char-à -bite en promotion. Une collection ludique pour les futurs tueurs en série.





Henry DARGER : l’ami Henri peint à merveille les têtes de cornichon et la gueule de bois. Au sens premier du terme. Un monde sombre et un sens des proportions étrange… Mais un talent non négligeable. Un peu comme du Magritte sous crack.





Horst HAACK : l’homme avait le choix entre devenir tueur en série de bébés chiens ou écrire pour évacuer toute la pression. Résultat : journal intime de psychopathe diplômé en art appliqué… C’est beau et envoûtant.





Bon et y’en a des tonnes mais je sens que je suis déjà dix fois moins intéressante que l’expo… Si tu dois bouger ton troufignon ne serait-ce qu’une fois le week-end prochain c’est pour aller là.
Et si t’es aussi bête que nous tu partiras avec minimum un numéro de Hey ! dans ta popoche.



Paix, amour, culture et bite en polymère.

14 commentaires:

  1. Après avoir lu ton review, je suis obligée d'y aller!

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  2. C'est exactement ce que je voulais entendre... enfin lire.

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  3. Te lire m'a donné envie, non pas d'aller voir une expo - même si j'aime bien les poupées tristes - mais de me refaire tatouer. Est-ce un effet corollaire prévisible ?

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  4. Mmm, sympa ta présentation. Bon je ne ferais pas 4h de train (avec bébé dans ma poche) pour une expo, je suis bien trop flemmarde (et puis, des premières, il y en a aussi par chez nous, on fait même des créations mondiales à deux pas...). Je crois savoir que dans les transports, les handicapés paient leurs places, mais pas leurs accompagnateurs. C'est peut-être aussi le cas dans un certain nombre de musées et d'expos, renseigne-toi : il te restera à trouver des handicapés intéressés par les mêmes choses que toi, et vous pourrez faire moins la queue, voir de plus près et peut-être payer moins cher... et en plus tu auras fait une bonne action : que demander de plus ?

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  5. STIOPKA : c'est normal mon petit.. mon amour fou du tatouage suinte de mes pores en se moment.tu me racontes tout en privée si tu te lances!

    AGNES : tu as peut être sauvée ma culture ma chère Agnes. Je m'en vais me procurer un handicapé dans les plus bref délais.

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  6. Bon. Mlle O. m'a convaincue d'aller à cette expo.
    Moi qui habite au sud de Troufignion-les-bains, je me projette :
    Je vais donc prendre le bus (qui passe toutes les 1h08) de la ligne 2 (la ligne 1 prenant uniquement la direction du Leclerc le plus proche) pour atteindre la gare ferroviaire. Puis un TER jusqu'à une grande ville (oui, une grande ville de province "contient" plus de 50 000 habitants et reste le seul moyen d'atteindre la la capitale), puis un TGV/corail qui m'emmènera en moins de 6h à Paris (3h de trajet, 2h30 de retard).
    J'achèterai un ticket de métro au même prix que mon abonnement annuel de bus troufignionnais, puis je prendrai le métro ligne 22 avec un changement pour la 47 puis la 163 (koooa? j'exagère??) pour arriver à proximité du lieu-dit.

    8h de trajet plus tard.............
    Je tente d'arrêter un passant local lancé à pleine vitesse pour lui demander si la direction est la bonne (l'avenue comptant près de 260 numéros, c'est une demi-journée perdue en aller retour si je me plante). En réponse, je reçois un coup de boule "pas-le-temps-tu-m'emmerdes-odieux-ton-poncho-rentre-donc-chez-toi". Aïe. Alors je redemande à un second passant qui, voyant mon nez en sang, passera son chemin encore plus vite (donc en mode "galop") avec un air dégouté. iiirk!

    Malgré tout encore (un peu) motivée, je finis par dégoter un plan de Paris à l'échelle 1/10000000000ème acheté 12 Euros au tabac du coin et, grâce l'aide d'un gentil sdf (ça doit être l'effet poncho) auquel j'aurais finalement bien donné ces 12 Euros, je situe enfin l'endroit où l'art m'attend impatiemment… A l'entrée, on m'explique d'un sourire moqueur qu'on ne rentre pas en poncho et encore moins avec un blase éclaté dedans une galerie. Et que de toutes façons, ça ferme et qu'il faut revenir après demain, après la journée de fermeture hebdomadaire. L'Art doit se reposer, que voulez vous! Du coup, moi aussi je suis fatiguée.
    Projection dans ma projection : (inception me voilà!) 2 nuits sur place me couteront 150 Euros au bas mot. Et encore, en jeûnant 48h.
    J'abandonne.
    J'offre mon poncho au sdf.
    Et je rentre chez moi.

    Mmmmmh…. En guise de sortie culturelle, je crois que je vais plutôt me faire une pizza devant les vidéos de Damien Jean ce weekend!

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  7. Le poncho sera a la mode post-hipster d'ici quelques mois, tu seras alors accueillie avec tapis rouge et coupette de champ'.

    supeeeeeerbe commentaire. On travaillerait pas dans la même boite? t'aurais pas genre BEAUCOPUP DE TEMPS A PERDRE?
    Ton poncho tu l'as cousu toi-même sur ton temps de travaille ?


    Amour et imposture.

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  8. amatrice aussi du site "Who killed Bambi " ?
    http://www.whokilledbambi.co.uk/

    Tu dois l'être. je veux voir.

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  9. Tu sais ce qu'il te dis le peckno de la foire à la choucroute au vin chaud ? hein !

    Ça s'appelle le marché de noël et c'est aussi beau que commercial et faux ! (sauf la choucroute et les crêpes chocolat-noir-fondu/banane-entière/noix-de-coco, le tout arrosé avec du vin chaud aux épices).

    In schpetzle we trust !

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  10. Tiens, j'ai vu cette expo en Septembre, et je me souviens m'être flanqué une trouille pas possible devant la poupée noire de Sylvia B. J'avais réussi à me persuader qu'elle était vivante (sans déconner, j'ai approché mon visage du sien et je suis sûre qu'elle a bougé!)

    Du coup, je me suis aussi fendue de ma review, plus axée sur Aurélie William Levaux et Henri J Darger.

    Voilà voilà, Krepenprovince, tu es géniale.

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  11. GG : Un bonne petite gauffre au choco...arrête tu me fais saliver. J'avoue la province des fois c'est bien.

    LIBELIUM : Je l ai lu... toi aussi tu aimes Aj Fosik nan? Mr patate en est fan...

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  12. C'est un article intéressant qui donne envie d'aller voir l'expo. En plus, je suis sûre que tu es plus calée que ce que tu nous fais accroire.
    Mais comme je suis loin, à vue de nez dans le même genre de province que GG (on a le même marché de Noël en tout cas) et que la prochaine fois que je reviens en pays civilisé c'est pour une grosse beuverie, ça va être difficile de se culturifier.
    Continue les critiques, c'est chouette.

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  13. Superbe cette expo on l'on tombe nez à nez dès l'entrée avec quatre des plus beaux tableaux de Clovis Trouille.... pour mieux rebondir dans une suite d'oeuvres toutes plus vivantes que diverses pour mieux comprendre notre vulnérabilité,nos entrailles,ou nos fantasmes et terreur inavouables etc..
    Souvent avec humour parfois avec une crueautée rafinée
    Rétines et cervelle rechargée après ce parcours vivifiant :)
    J'en ai bavé pour y acceder de ma province mais c'est moins fatiguant qu'un pélerinage a compostel et aussi salvateur.
    Ici dans ma province il n'y a pas de vin chaud mais du calva .
    j'ai même pas fait la queue pour voir Klimt au musé des beau art de Rouen et pas vu de poux sur la tête des visiteurs :)
    Par contre la capitale sent vraiment très fort la pisse entre deux coup de klaxon.........

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