jeudi 26 mai 2011

Serment d’hypocrite.


Quand j’étais une adolescente rebelle, bornée et très élitiste (pléonasme) je disais : « Jamais j’irai raconter ma vie à une coiffeuse, la tête pleine de bigoudis en lisant Voici, c’est trop la loose ».
Va savoir pour quoi ça me semblait être le comble de la vie ratée. J’aurais pu aussi m’imaginer la seringue dans le bras, à gerber dans les cartons qui me servent de lieu de vie après m’être pris une rouste par mon mac. Oui, mais non, dans un avenir raté made in moi, je reste toujours dans la middle class et je vais quand même chez le coiffeur. Il faut croire que même dans mes peurs du futur, je manquais d’ambition.

Bon pour ce qui est du coiffeur, j’ai vite abdiqué, j’ai le cheveu filasse, que voulez-vous et j’avais envie d’être suffisamment présentable pour espérer des galipettes avec des types à cheveux longs (oui dans ma vie il y a une certaine obsession des cheveux….).
Même si j’avais eu des velléités d’arrêter les colorations noir corbeau dès la fin de ma crise d’adolescence venue, les cheveux blancs ont pris le relais bien plus vite qu’ils n’auraient dû.
Résultat, je suis abonnée aux séances de torture au Tchip en bas de chez moi.

 À la coiffeuse je ne raconte pas ma vie. Les premiers temps parce que j’évitais soigneusement de lui dire autre chose que « Bonjour. Carré plongeant  de grosse biatch. Coloration noire. En carte bleue. Merci. Au revoir». 
Depuis quelque temps, c’est surtout parce que je n’ai absolument plus l’occasion d’en  placer une.

Car un jour, drame, il y eut… Un jour, j’ai eu le malheur de dire « bonjour, ça va ? ». Bonjour ÇA VA avec un point d’interrogation qui appelle donc une réponse.
Pourquoi j’ai dit ÇAVApointd’interrogation.  D’habitude c’est pas la politesse et la sympathie qui m’étouffent, je me contente d’un « gnuhnhihhuuhuhhujour, ginhihihcomme dhab’ ».
Mais là, c’était un jour de rtt, il faisait beau, j’ai ripé. Je lui ai demandé si ça allait. Faute grave.

Depuis, elle me trouve follement agréable. Je sais tout de sa période punkette, de sa belle-mère, de ses infections urinaires, des traces sur les cuisses que lui laissent les bas, de son copain qui a l’air d’un sacré crétin misogyne  d’un type encore un peu jeune. Comme si se faire tripoter les pellicules sèches  n’était pas assez désagréable comme ça.
La prochaine fois, si elle me raconte ses mycoses, je pars. Même avec la couleur sur la tête je promets que je pars.
En attendant je suis polie et je dis « hum hum, oh, ah oui ? » je crois que là-dessus encore j’ai fait une concession terrible. Je discute avec la coiffeuse la tête pleine d’ammoniaque qui pue et donne le cancer.
Ocytocine-prépubère, ne regarde pas ce qu’est devenue Ocytocine+26 et demi, c’est une véritable boucherie.

Bon là, tu te dis, que je ne peux pas tomber plus bas dans mes idéaux. Ouais… tu te dis qu’en bonne amoureuse des livres et de la culture et en bonne connasse je dis « Jamais je n’achèterai  les torchons à scandale, c’est la lie de la presse, de la littérature, même moi je vois les fautes dans les articles alors que je suis une pine en orthographe (Maîtresse Gamelle peut confirmer, elle se prend une bonne suée à corriger tous mes articles).
Oh mais ne t’en fais pas, je le dis, je le clame à qui veut bien croire à ma rigueur intellectuelle (les naïfs).

Et je ne les achète pas, c’est vrai. JAMAIS je n’ai acheté un truc people, même bloquée 3 jours et 5 heures dans un aéroport. JAMAIS…
… oui mais chez tchip ils sont gratuits les Public, Closer et autres Oops et puis comme il faut bien passer le temps pendant que ma coiffeuse me raconte ses pipis brûlants… bon benh… hum. Je vais quand même pas sortir mon Roberto Boleno qui fait 1300 pages ? Ca ne serait pas poli…
Alors que mater les fesses molles d’une starlette de Télé Réalité que je ne connais pas sur papier glacé… ça… bon, quand t’es chez le coiffeur, c’est largement toléré.

Faut bien se l’avouer, pardon Ocytocine-petite-pétasse-acnéique, j’adoooooore mater les magazines du genre.
Chez Faneliah, je tirais toujours de dessous son bordel les fameux magazines rose fluo, avec cellulite et rupture en couv ‘, en hurlant «  Ennnh c est trop de la merde ces trucs-là ».
 Ca ne m’a jamais empêcher de les lire de la première ligne jusqu’à l’horoscope.

Quand j’arrive chez belle-maman, juste après avoir bâfré des kilos de gratin de courgettes, je me jette dans les toilettes, pas pour vomir mes excès alimentaires, mais pour récupérer les derniers Public qui y traînent.
 Je me vautre dans le canapé, le ventre tendu de bonne pitance, avec le chat obèse à côté de moi (10 ans de repas chez Belle-Maman, ça fait mal même à la ligne des animaux domestiques) et je me plonge dans mes atroces lectures dominicales.

J’alpague ma belle-sœur toutes les dix minutes pour qu’elle me décrypte tout ce que je ne comprends pas, à savoir à peu près 99% du magazine. Parce qu’à part Brad Pitt et deux trois acteurs hollywoodiens, je suis complètement aux fraises.
- C’est qui ça la fille qui gerbasse dans son bonnet couture a trois milles dollars?
- C’est Lindsay Lohan.
- … ?
- Tu connais pas ?
- Bah nan… et ça, c’est qui la p’tite fille ?
- Suri Cruise.
- souricrouze ? Elle s’appelle souris la gamine ? hin hin hin.
- Ça fait trois ans que personne ne rit plus de ça… qu’est-ce que mon frère fait avec toi ?

C’est vrai Monsieur Patate Frite et moi on est très différent là-dessus.  Lui, il est incollable, il te récite la vie sexuelle de Pamela Anderson et de Britney Spears en ordre chronologique avec histogramme et plan en coupe de leurs implants mammaires après t’avoir fait un monologue sur les joies du post-hard cord danois. Sans transition. Cet homme a un panel de connaissances assez incroyable.
Au trivial Poursuit people, c’est un coéquipier hors pair. D’ailleurs quand on a eu un doute sur la vie sentimentale de Ramzy, avec Maîtresse Gamelle, on l’a appelé directement.
- Cerveau en fusion, mine de diamants de mon âme, sais-tu avec qui fricote Ramzy ?
- Mais bien sûr mon tank doré à canon scié,Ramzy vit avec Anne de Petriny depuis onze ans, ils ont deux filles, Ava, 2 ans, et Ella, 8 ans. Autres choses ma mitraillette au mimosa ?
- Non merci mon arme de destruction lascive (ouh elle est belle celle-là), je suis tombé suffisamment bas dans mon estime avec ce coup de fil. Tu peux disposer.

Bref tout ça pour dire, que non seulement je sors avec un biatch dans un corps de coreux, mais qu’en plus j’ai complément trahi mon moi adolescent sans ciller et en continuant à jouer les hypocrites intègres et les intellectuelles parisiennes.

Demain je te raconte comment je voulais participer à la diffusion du savoir en travaillant dans des maisons d’édition d’art et comment j’ai fini par faire des campagnes de pub pour la bière bas de gamme et les yaourts 0%.

6 commentaires:

  1. ben comme quoi, l'amour mène à tout!

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  2. J'ai envie de croire que le pire c'est jsutement de ne pas changer.
    Les gens comme ca se retrouve sur "La chenille qui redemarre", un truc d'avant leur generation, et perso j'ai pas envie dans #) ans de me retrouver dans "Voyages Voyages"

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  3. J'ajouterai que les coiffeurs c'est le mal. A bas les coiffeurs, pendons les avec leur extensions ! Et que oui, tu devrait avoir honte d'avoir trahi ta toi adolescente.

    Encore que, comme toutes les adolescente, c'était sûrement qu'une petite idiote qui n'y connait rien à la vie et qui n'a aucune idée de comment c'est dur d'être une "hypocrite intègre et une intellectuelle parisienne"

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  4. Donc si je vous comprends bien, je mets un taquet a ocytocine 16 ans et je lui fait écouter la chenille jusqu'à ce que son petit air de crâneuse disparaisse?
    Ok alors apportez vos "vous" adolescents aussi, on va faire ca en groupe!

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  5. Moi, à 12 ans, j'étais sûre d'écrire mon premier best-seller avant 20 ans. Autant te dire que si la Céleste d'alors savait qu'à 37 ans, je fais la danse de la joie chaque fois que j'ai un commentaire sur mon blog, elle préférerait sans doute mettre fin à mes souffrances...

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  6. Pas de bonhommme pour commenter ÇA !
    Peut-être parce qu'on a compris l'intérêt de perdre nos cheveux au plus vite. Monsieur Patate tu es un génie !

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